effets et conseils

Le bétonnage par temps chaud

La chaleur entraîne de nombreuses modifications sur l’état micro et macro structural du béton, que ce soit au niveau de ses propriétés physico-chimiques, thermiques ou mécaniques. Dans cet article nous verrons de plus près quels sont les principaux effets de la hausse des températures sur le béton et en quoi ils sont problématiques pour le bétonnage, puis quelles solutions nous pouvons mettre en place afin d’y remédier. N’hésitez pas à consulter également notre article sur le bétonnage par temps froid !

Par Léa Ordener / Le 25 février 2021

Les effets de la chaleur sur le béton

1) Elévation de la température du béton :

Logiquement, une hausse de la température extérieure va entraîner une hausse de la température du béton.

Thermomètre montrant la hausse de la température

Chaque constituant (ciment, eau, granulats), participe ainsi à l’augmentation de la chaleur de par leur quantité et leur masse.

Par exemple, une augmentation de 10°C de la température : du ciment augmente la température du béton de 1°C, de l’eau augmente la température du béton de 2°C, et des granulats augmente la température de 7°C.

Les agrégats, représentant 60 à 80% du poids total du béton influencent ainsi principalement l’évolution de la température au sein du béton. Cela peut créer d’importants gradients thermiques et être à l’origine de fissurations thermiques.

N’hésitez pas à consulter notre article sur la composition du béton pour en savoir plus sur ces composants !

2) Réduction de la résistance du béton :

Qu’est-ce que la résistance du béton ?

Le béton atteint une certaine résistance au cours de sa prise et de son durcissement. En général, au bout de 7 jours, le béton acquiert environ deux tiers de sa résistance caractéristique (c’est-à-dire la résistance souhaitée pour l’ouvrage) et au bout de 28 jours, l’intégralité de cette résistance.

À quoi est due cette résistance ?

Elle découle des réactions chimiques durant la phase d’hydratation permettant la prise, le durcissement du béton et ainsi, sa résistance.

L’hydratation du béton, et plus précisément l’hydratation du ciment, ce sont les réactions chimiques qui se produisent entre le ciment et l’eau (hydratation des silicates et des aluminates composant le ciment) formant des composés insolubles (ou hydrates) qui permettent la prise et le durcissement du ciment. Ces réactions sont exothermiques, c’est-à-dire qu’elles produisent de la chaleur.

Quel est donc l’effet de la température sur la résistance du béton ?

De ce fait, plus la température est élevée et plus le processus d’hydratation sera rapide. En effet, la chaleur d’hydratation sera d’autant plus importante et le développement des hydrates sera ainsi d’autant plus rapide. La prise du béton va alors s’accélérer, et la résistance sera atteinte très rapidement. Mais à long terme, les résistances seront finalement plus faibles. En effet, les hydrates créés sont plus denses, plus grossiers et distribués de manière hétérogène, ce qui induit un développement microstructural désorganisé, et ainsi un réseau poreux plus large, et donc, moins de résistance.

En résumé, plus la température est élevée, et plus le taux d’hydratation et donc la résistance sont importants, à court terme. A contrario, à long terme, et à forte température, le taux d’hydratation et la résistance seront faibles.

L'évolution de la résistance du béton en fonction de la température et du temps
Évolution de la résistance du béton en fonction de la température et du temps

NB : Avec l’augmentation de la vitesse de prise du béton, le temps de prise est ainsi réduit : il est divisé par deux quand la température du béton passe de 20°C à 40°C. Pour un ciment type CEM I 52,5 N, le début de prise observé à 20°C est de l’ordre de 3H et à 40°C, de 1H30.

Que provoque finalement une augmentation trop rapide de la température du béton ?
La fissuration du béton suite à son retrait
Fissuration du béton

Elle va provoquer à terme une augmentation du retrait du béton.

Le retrait, c’est le rétrécissement d’un matériau, dû à la perte de l’eau qui le compose, et pouvant ainsi provoquer des fissures. Il ne dépend pas de la mise en charge du matériau.

Dans le cas du béton, c’est un phénomène parfaitement normal mais qui doit être contrôlé. Lorsque le retrait n’est pas maîtrisé, une fissuration excessive apparaitra. Le retrait se produit dès le durcissement du béton et continue de se développer au cours du temps. Il est donc indispensable de contrôler l’élévation de température au sein du béton, mais aussi de disposer des joints de dilatation dans l’ouvrage afin de canaliser le retrait dans des zones prédéfinies.

3) Baisse de l’ouvrabilité du béton :

Qu’est-ce que l’ouvrabilité du béton ?

C’est la capacité du béton à être facilement mis en œuvre. Il s’agit donc d’un béton fluide et maniable.

Comment expliquer la baisse de l’ouvrabilité en cas de forte chaleur ?

Comme nous avons pu le voir précédemment, la hausse des températures entraîne une accélération de la prise du béton, et ainsi une rapidité du durcissement et de la résistance de ce dernier. Ainsi cela signifie que le béton sera moins fluide et donc moins manipulable lors de son coulage. En effet, la perte d’ouvrabilité entraîne un raidissement du béton pouvant rendre sa mise en œuvre impossible.

NB : L’erreur est la tendance à vouloir rajouter de l’eau dans le mélange afin de le fluidifier. Cela modifie le rapport E/C et réduit alors la résistance et la durabilité du béton. Par exemple, si l’on ajoute 10 litres d’eau/m3 de béton, la résistance sera de moins 10% au bout de 28 jours.

L'évolution de la résistance du béton en fonction de la teneur en eau
L’influence de la teneur en eau sur la résistance du béton

Que signifie le rapport E/C ?

Il désigne le rapport entre le taux d’eau et de ciment présent dans le béton. Le choix de la teneur en eau ou en ciment varie selon l’environnement ou si l’on veut un béton plus ou moins résistant par exemple.

4) Dessiccation du béton :

Quels sont les facteurs pouvant mener à la dessiccation du béton ?

La chaleur, un air sec avec une faible humidité ambiante, une vitesse de vent élevée ou encore l’ensoleillement, l’ensemble de ces facteurs va favoriser l’évaporation de l’eau du béton aux alentours de 30°C. Cette eau principalement libre, c’est-à-dire non-liée aux composants du béton, va entraîner la déshydratation de ce dernier, son retrait et enfin l’apparition de fissures.

Mais ce n’est pas tout…

Outre la modification de la teneur en eau, cela va compliquer l’étape de durcissement du béton. En effet, sans eau, il est compliqué que l’hydratation se fasse correctement entraînant ainsi une augmentation de la porosité et une perte de la résistance du béton.

Il sera ainsi nécessaire d’adapter le rapport E/C selon la température, ainsi que de continuer à humidifier régulièrement le béton lors du durcissement.

5) Décomposition des constituants du béton :

La perte de l’eau suite à la dessiccation entraîne une décomposition chimique de la pâte de ciment et plus particulièrement du gel C-S-H.

Qu’est-ce que cela donne de plus près ?

Le gel C-S-H, ce sont des silicates de calcium hydratés réunis sous forme de matrice et permettant ainsi la solidité du ciment. Le béton est un matériau poreux, ayant une phase granulaire et une phase liante. Cette porosité diminue au fur et à mesure de l’avancement de l’hydratation, avec le remplissage des pores par les hydrates alors formés tels que les C-S-H. Ces derniers se développent à la surface des grains de ciment non hydratés et comblent ainsi progressivement les interstices capillaires entre les grains.

La porosité du béton c’est donc grosso modo l’agencement d’hydrates et de grains, de bulles d’air et d’eau saturée. Ceci dit, cela reste un réseau beaucoup plus complexe en réalité.

Ainsi, sans eau et donc avec une limitation de l’hydratation du ciment, la porosité du béton sera plus importante, sa résistance moindre, et il y aura de ce fait une augmentation de la perméabilité.

De plus, la chaleur entraîne des déformations thermiques au sein du béton qui peuvent être à l’origine de fissures dites thermiques. Ces phénomènes ne font qu’accentuer l’élargissement des pores du matériau.

En résumé

L’augmentation de la température extérieure entraînera la hausse de la température du béton et de ses constituants, sa dessiccation et sa décomposition qui le rendront plus poreux, perméable, moins ouvrable et ainsi moins résistant. Au niveau du chantier, cela se traduit en une prise du béton et un durcissement plus rapide et en un béton moins maniable et donc plus compliqué à couler lors du bétonnage.

Sur le long terme, cela peut détériorer le béton, qui sera moins stable et moins résistant aux conditions extérieures. Des fissures, une surface irrégulière ou des différences de couleur peuvent en résulter.

Les conseils pour effectuer un bétonnage par temps chaud

Le fascicule n°65, venant appuyer la norme NF EN 13670/CN “Exécution des structures en béton” préconise notamment de prendre des précautions vis-à-vis du bétonnage par temps chaud et de la protection du béton. Voici quelques conseils permettant d’être en accord avec la norme.

NB : Les normes sont des documents qui expliquent les différentes dispositions à respecter en France en complément des dispositions Européennes. Ces normes sont complétées par des normes d’exécution (comme les DTU) ou d’autres documents de référence qui permettent d’apporter des exemples d’application de la norme en question (comme les fascicules).

Si vous vous posez encore des questions sur le bétonnage, notre article sur les principes du bétonnage vous guidera !
Infographie : 7 conseils pour réussir son bétonnage par temps chaud
Liste de 7 conseils pour bien réussir son bétonnage par temps chaud

Télécharger la version PDF de l’infographie 7 conseils pour réussir son bétonnage par temps chaud.

Avant la mise en oeuvre :

1) Planifier son chantier

Il est important de bien s'organiser pour son chantier
Il est important de bien s’organiser pour son chantier

Cela signifie essayer de s’organiser au niveau des processus internes et externes au chantier pour que le bétonnage se déroule le mieux et le plus rapidement possible.

En adaptant les horaires de bétonnage en fonction des températures extérieures

Cela va de soi, mais bétonner aux heures les plus fraîches de la journée ou bien la nuit dans la mesure du possible, permet de limiter les effets de la chaleur lors du transport et de la manipulation du béton.

En limitant le temps de transport et de manoeuvre

En prévoyant suffisamment d’effectifs en termes d’équipement et de personnel et en choisissant des centrales BPE proches de son chantier, on optimise ainsi son temps de transport et de bétonnage.

En préparant ses équipes
Préparation des équipes pour le bétonnage en cas de chaleur
Préparation des équipes pour le bétonnage en cas de chaleur

Organiser des formations pour que ses équipes soient opérationnelles sur le terrain, encourager la collaboration et tenir régulièrement des réunions avec l’ensemble des acteurs du chantier permet de gagner encore plus en efficacité.

2) Adapter la formulation du béton

Ne pas oublier que la modification de la formulation du béton nécessite des études et des convenances préalables, qui doivent être réalisées dans des conditions proches de la réalité et du chantier.

Choix du ciment

Il est recommandé de choisir un ciment faiblement exothermique, de telle sorte qu’il dégage peu de chaleur et notamment lors de l’hydratation. De plus, il vaut mieux éviter les ciments de type CEM I ou CEM II de classe 52,5 R à forte teneur en aluminate tricalcique (C3A).

Pourquoi ?

Avec l’élévation des températures, des réactions sulfatiques internes (RSI) peuvent apparaître, susceptibles de former une ettringite différée, pouvant agresser chimiquement le béton avec l’apparition de gonflements. En effet, il existe un lien direct entre la teneur en aluminate tricalcique du ciment et la vitesse de dégradation du ciment produite par ces attaques sulfatiques.

Choix des granulats

Il vaut mieux privilégier des granulats aux coefficients d’absorption d’eau modérés.

Utilisation d’adjuvants
Utiliser des ajuvants comme des retardateurs de prise ou des plastifiants réducteurs d'eau
Choisir des adjuvants afin que le béton reste ouvrable

Comme des retardateurs de prise qui prolongent le temps d’utilisation du béton en stabilisant le processus d’hydratation, des plastifiants ou superplastifiants réducteurs d’eau permettent de garder une certaine ouvrabilité du béton sans modifier le rapport E/C et de limiter également la dessiccation.

NB : L’utilisation de ces adjuvants nécessitera la mise en place d’une cure prolongée.

Préparation du béton

Le béton doit être fabriqué à une température maximale de 32°C. Au-delà, il faudra prévoir la mise en place de dispositions spécifiques comme un refroidissement de l’ouvrage.

3) Conserver au maximum la fraîcheur

Détourner au maximum les effets de la chaleur en utilisant diverses stratégies.

En évitant l’ensoleillement

Au niveau du transport, on peut privilégier le stationnement à l’ombre des camions malaxeurs. Adopter du matériel de couleur blanche peut également limiter le réchauffement de ces derniers.

Les coffrages et surtout les coffrages métalliques doivent également être préservés du soleil.

En humidifiant le matériel

Que ce soit les camions toupies, la zone de vidange du béton ou encore le coffrage qui n’absorberont pas l’eau du béton frais par la même occasion.

NB : Éviter un arrosage trop important pour ne pas créer de flaques d’eau.

Les composants du béton ne doivent pas être épargnés, comme les granulats qui peuvent aussi être humidifiés. Il ne faudra pas oublier si c’est le cas de prendre en compte l’apport d’eau dans la formulation du béton.

Au niveau du stockage des matériaux
Faire attention de bien préserver l'ensemble des matériaux servant à la fabrication du béton à l'ombre
Faire attention de bien préserver l’ensemble des matériaux servant à la fabrication du béton à l’ombre

Le béton et ses constituants doivent être au maximum stockés à l’ombre.

Et notamment les granulats dont la température peut ainsi atteindre facilement les 50°C à la surface, ce qui influence ainsi grandement la température du béton. Dans le cas où le béton est préparé sur le chantier, il est ainsi conseillé d’utiliser les granulats le matin ou de les refroidir au préalable. Les silos de stockage à granulats peuvent également être équipés d’une isolation thermique.

En refroidissant l’eau

En réfrigérant l’eau, on peut ainsi abaisser la température du béton.

Pendant la mise en oeuvre :

1) Opter pour une exécution rapide

Le coulage du béton dans les coffrages doit être rapide et efficace en réduisant tout temps d’attente.

Pour des quantités importantes de béton, on peut avoir recours à des systèmes de refroidissement du béton dans la masse. Il est recommandé en tout cas que la température du béton frais soit inférieure à 30°C.

2) Ne pas ajouter d’eau

Il est recommandé de ne jamais ajouter d’eau dans le mélange après le malaxage du béton car comme vu précédemment, cela entraînerait une baisse de sa résistance.

Après la mise en oeuvre :

Les heures suivant la mise en œuvre sont cruciales pour limiter notamment les fissurations.

1) Protéger le béton

Il est fortement recommandé de protéger le béton après son coulage, le but étant de maintenir le béton à une température stable pour qu’il puisse se solidifier correctement. Un indicateur de cette température est la vitesse d’évaporation qui ne doit pas dépasser 1 kg/m²/h.
Il existe différents types de protection du béton. Ces protections doivent bien être maintenues durant plusieurs heures voire plusieurs jours selon les conditions climatiques.

Application d’une cure

La cure du béton est essentielle en cas de bétonnage par temps chaud.

Un produit de cure, pulvérisé à la surface du béton, doit être appliqué immédiatement après le coulage. Il va former un film étanche qui empêchera l’eau présente dans le béton de s’évaporer durant sa prise et au début de son durcissement. Lorsqu’il s’agit d’une surface importante, il faut appliquer au fur et à mesure le produit sur le béton déjà coulé.

Il existe diverses déclinaisons de produits de cure, comme ceux de couleur blanche, permettant ainsi de réfléchir la lumière du soleil et donc de réduire le réchauffement du béton.

NB : Ce produit est fortement conseillé en cas de fortes chaleur et de vent.

D’autres protections peuvent être utilisées comme des bâches, des toiles de jute, des géotextiles imbibés d’eau ou encore des pulvérisateurs d’eau.

2) Refroidir le coffrage

Humidifier régulièrement le coffrage après le bétonnage.

NB : Dans certains cas, on peut même avoir recours à l’azote liquide pour rafraîchir le béton ! Cette pratique est plus adaptée pour les pays chauds et pour la production de grands volumes de béton.

Gardez à l’esprit que chaque scénario de temps chaud est unique, il ne faut donc pas hésiter à analyser individuellement sa situation, préparer en amont le bétonnage en formant ses équipes et en prévoyant le matériel nécessaire. Cela dépend également du résultat voulu et de l’importance de la résistance du béton. De plus, n’oubliez pas qu’il n’y a pas que le béton qui est sensible à la chaleur : pensez aussi à bien ménager les travailleurs !

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