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Empreinte carbone du béton : origines et conséquences

Le béton est un des matériaux les plus utilisés dans le monde car c’est un incontournable dans nos constructions. Il dispose de nombreux atouts parmi lesquels une durée de vie supérieure à 100 ans, une résistance mécanique élevée ainsi qu’un coût économique et énergétique intéressant. Mais depuis l’industrialisation de la fabrication du ciment au XIXe siècle, le béton génère une empreinte carbone élevée et contribue à l’épuisement de certaines ressources telles que le sable et les granulats. Dans ce premier article sur la thématique de l’impact environnemental du béton, nous verrons quelles sont les origines et les conséquences de son empreinte carbone.

Par Léa Ordener / Le 15 septembre 2021

Qu’est-ce que l’empreinte carbone du béton ?

En France, en 2019, 21 millions de tonnes de produits en béton ont été fabriqués d’après la Fédération de l’Industrie du Béton. De par son importante production, on peut dire que le béton est un matériau de construction particulièrement émetteur de carbone et donc dans d’autres termes ayant une empreinte carbone élevée.

Ainsi, le secteur de la construction représente 10% des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiales et le béton, 52% des émissions de ce secteur :

Graphique représentant le taux d'émissions carbone par secteur d'activité
Répartition des émissions de gaz à effet de serre par secteur d’activité (données : Manicore & Bribián et al)
Graphique représentant le taux d'émissions carbone par matériau du secteur de la construction
Répartition des émissions de GES par matériau pour le secteur de la construction (données : Manicore & Bribián et al)

Que signifie “empreinte carbone” et quel est l’impact sur notre planète ?

L’empreinte carbone ou impact carbone est la quantité d’émissions de gaz à effet de serre (GES) produite à une certaine échelle (objet, matériau, individu, nation, planète, etc.). L’empreinte carbone est mesurée en kg de CO2 équivalent (kgCO2eq). L’empreinte carbone du béton est calculée selon la norme NF EN 15804.

On appelle gaz à effet de serre un ensemble de gaz présents à l’origine dans l’atmosphère ou bien produits par l’activité humaine (combustion d’énergies fossiles, agriculture, systèmes de climatisation et de réfrigération, etc.), qui absorbent le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre.

C’est pour cela qu’il existe deux types de GES :

  • Les GES naturellement présents dans l’atmosphère, par exemple la vapeur d’eau (H2O).
  • Les GES d’origine anthropique, les plus cités étant le méthane (CH4), les halocarbures (PFC, HCF), les protoxydes d’azote (N2O), l’hexafluorure de soufre (SF6) et le plus connu et dont les émissions sont les plus importantes, le dioxyde de carbone (CO2).

Le CO2 a la particularité d’être naturellement présent dans l’atmosphère, mais son niveau a augmenté de 50% depuis le début de l’ère pré-industrielle, en lien avec l’importance de l’activité humaine. C’est le GES dont les émissions sont les plus importantes.

D’ailleurs, l’empreinte carbone s’exprime en CO2 équivalent car l’on estime que le CO2 est le gaz principalement émis et qu’il est plus simple d’avoir une mesure unique plutôt que de comparer chacun des gaz entre eux.

Pourquoi les GES ont-ils un impact sur notre planète ?

Les GES ont tendance à réchauffer l’atmosphère. Ce sont des gaz qui absorbent une partie des rayons solaires, les redistribuant sous forme de radiations au sein de l’atmosphère terrestre. C’est ce qu’on appelle l’effet de serre.

Schématisation de l'effet de serre
Représentation schématique de l’effet de serre

Lorsque la Terre est éclairée par le soleil, sa surface réémet une partie des rayonnements qu’elle a reçus. Sauf que certains GES comme le méthane, l’azote ou le CO2, retiennent une partie de ce rayonnement infrarouge émis par la Terre et lui renvoient, ce qui contribue à la réchauffer suffisamment pour que la vie y soit possible.

Cependant, depuis l’ère industrielle, les activités humaines émettent de grandes quantités de GES, principalement du CO2 et du CH4 (méthane). Ces gaz s’accumulent dans l’atmosphère et atteignent des concentrations très élevées. Conséquence, l’effet de serre s’intensifie et entraîne ce qu’on appelle le réchauffement climatique qui engendre entre autres la montée des températures, l’élévation du niveau des océans, l’augmentation des précipitations ou encore l’acidification des océans.

Le béton, qui a une empreinte carbone d’environ 250 kgCO2eq/m² pour le logement collectif et 350 kgCO2eq/m² pour le tertiaire selon l’IFPEB (Institut Français pour la performance du bâtiment), se place en première position des émissions de GES liées aux matériaux de construction. On parle également d’indice de réchauffement climatique du béton. Les émissions de GES du béton proviennent en majeure partie de la fabrication du ciment contenu dans le béton.

En France, la production d’une tonne de ciment émet en moyenne 0,62t CO2eq (d’après le ministère de la Transition Écologique et Solidaire).

Zoom sur l’empreinte carbone du béton

Avant d’en découvrir plus sur l’empreinte carbone du béton, voici quelques chiffres comparant les empreintes carbone de différents matériaux :

  • Béton courant (classe de résistance C25/30): 235 kg de CO2eq/tonne de béton ;
  • Acier : 585 kg de CO2eq/tonne d’acier ;
  • Ciment : 600 kgCO2eq/tonne de ciment (en France) et 1000 kgCO2eq/tonne de ciment (moyenne mondiale) ;
  • Aluminium : 1800 kg de CO2eq/tonne d’aluminium.

Dans le cas du béton armé, l’empreinte carbone va varier selon la quantité d’armatures qu’on met dans le béton. Un béton armé va être entre 20 et 40% plus carboné que le même béton non armé.

(source : ADEME)

L’origine de l’empreinte carbone élevée du béton

Graphique représentant la masse de chaque composant du béton
Répartition massique des constituants du béton (sources : ATILH & UNPG)
Pour rappel, le béton est constitué de sable, d’eau, de granulats, de ciment et d’adjuvants, c’est le sujet de l’article sur la composition du béton.
Graphique représentant le taux d'émissions carbone par matériau contenu dans béton
Répartition de l’empreinte carbone pour la fabrication de chaque composant du béton (sources : ATILH & UNPG)

Sur les schémas précédents, on constate que l’empreinte carbone de l’eau, du sable et du gravier contenus dans le béton est particulièrement faible contrairement à celle du ciment. En effet, le ciment ne représente que 11.7% du poids d’un béton courant mais il est responsable de 98% des émissions de GES du matériau béton pour deux raisons :

  1. Le processus de fabrication du ciment est très énergivore, car le clinker va être chauffé aux alentours de 1450°C via des combustibles fossiles. Cette étape génère près d’un tiers des émissions de GES du ciment.
  2. La décarbonatation du calcaire, qui est une réaction chimique produisant du CO2, est responsable des deux tiers restants des émissions de GES du ciment.
Schématisation des différentes étapes de production du ciment
Les différentes étapes de production du ciment (source : IFPEB)
Pour en savoir plus sur le clinker et la fabrication du ciment, consultez notre article sur la conception du béton.

Ainsi, lors de la fabrication du ciment, c’est la fabrication du clinker qui va générer le plus de GES. Les dernières étapes de la production du ciment n’ont qu’un impact léger.

Le clinker est le principal composant du ciment, obtenu par la cuisson de calcaire et d’argile (80% de calcaire et 20% d’argile). Lorsque le cru (carbonate de calcium CaCO3, silice SIO2, alumine Al2O3) est chauffé durant la phase de clinkérisation, la décarbonatation du calcaire va avoir lieu.

Qu’est-ce que la décarbonatation du calcaire ?

La décarbonatation du carbonate de calcium du calcaire (CaCO3) se produit à partir de 650 °C lorsque le CaCO3 émet une molécule de dioxyde de carbone pour former de la chaux vive (CaO). La chaux vive permettra de fabriquer le clinker puis le ciment, tandis que le dioxyde de carbone est un déchet de cette réaction.

La décarbonatation : CaCO3 → CaO + CO2

Une empreinte carbone présente tout au long du cycle de vie du béton

Cependant, il ne faut pas oublier que l’empreinte carbone du béton ne concerne pas que sa fabrication. En effet, il faut bien veiller à prendre en compte l’ensemble du cycle de vie du béton, de l’extraction des matières premières à sa mise en œuvre, et même, jusqu’à sa destruction.

Schématisation des différentes étapes du cycle de vie du béton
Généralisation des différentes étapes du cycle de vie du béton (source E6)

Ainsi, les granulats et le sable ne comptent pas dans le bilan carbone lors de la fabrication du ciment, néanmoins, il est important de souligner que leur extraction nécessite d’utiliser de gros engins de chantier de carrières ou de mines (pelles ou chargeuses) fonctionnant au diesel. De plus, il faut également prendre en compte l’ensemble des transports effectués, que ce soit pour acheminer les matériaux jusqu’à la cimenterie et la centrale à béton, ou le béton jusqu’au chantier.

Réaliser le bilan carbone d’un matériau consiste à identifier pour chaque étape de son cycle de vie, quelle est la quantité d’émissions de CO2 produite.

Voici un exemple de la répartition des émissions carbone du béton armé en prenant en compte l’ensemble des étapes de son cycle de vie (source AFGC) :

Graphique présentant la répartition des émissions de CO<sub>2</sub> du béton armé de son extraction à son usage
D’autres indicateurs environnementaux peuvent être pris en compte même s’ils ne rentrent pas dans le calcul de l’empreinte carbone. En effet, la fabrication du béton nécessite des matières premières telles que les granulats ou le sable qui sont des ressources non renouvelables, et qui donc, si on ne les économise pas, pourraient ne plus exister à terme. D’autant plus que les granulats sont présents environ aux 2⁄3 dans la composition du béton.

Des pistes pour réduire l’empreinte carbone du béton

Aujourd’hui en France, nous produisons à peu près 18,5 millions de tonnes de ciment par an émettant environ 10 millions de tonnes de CO2eq et pas loin de 4,6 milliards de tonnes de ciment dans le monde, relâchant approximativement 2,5 milliards de tonnes de CO2eq (sources : consoGlobe, techniques de l’ingénieur).

Pourtant, l’enjeu de la SNBC (Stratégie nationale bas carbone) du secteur de la construction est de se rapprocher de la neutralité carbone pour 2050.

Quelques pistes pour réduire l’empreinte carbone de la filière béton existent, telles que l’utilisation du béton bas carbone ou encore la mise en place de la RE2020 depuis 2022. Au-delà de l’impact carbone du secteur, il y a également une forte consommation de matériaux et de nombreux déchets produits. Il existe également des solutions de recyclage et de valorisation du béton de déconstruction. Ce sont des sujets dont le blog Suite Dispatch parle régulièrement.

En attendant, une solution comme Concrete Dispatch permet de calculer l’empreinte carbone du béton et maîtriser parfaitement les quantités de béton utilisées sur le chantier et donc d’éviter la surconsommation, les erreurs de formule et les non-conformités.

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